An Pierlé: «Je souhaitais revenir à quelque chose plus sobre»
Une bonne dizaine d’années après ses débuts remarqués, An Pierlé revient sur la pointe des pieds avec un album solo apaisé faisant la part belles à des compositions filmiques. Mère épanouie et artiste accomplie, elle continue son petit bonhomme de chemin loin des chemins balisés et nous offre quelques ballades mélancoliques de très haut vol. Rencontre!
GUIDO: Strange Days est probablement ton album le plus personnel…
An Pierlé: Absolument, c’est un album que j’ai écrit et enregistré pour me faire plaisir. Je suis tout-à-fait consciente que Strange Days ne me permettra pas de passer souvent à la radio, et cela n’a pas vraiment d’importance. Je suis heureuse de faire le métier que je fais, et je bénéficie d’une liberté artistique complète. Que pourrais-je espérer de plus? Mon parcours artistique dure depuis maintenant quatorze ans et cela me procure toujours autant de plaisir qu’à mes débuts.
GUIDO: Tu as mis le White Velvet au chômage technique pour cette parenthèse en solo…
An Pierlé: Cela faisait quelques années que j’avais l’envie de me mettre seule au piano. L’album précédent faisait la part belle à une instrumentation plus riche et le piano avait perdu en importance lors de ma dernière tournée avec le White Velvet. Je souhaitais revenir à quelque chose de plus dépouillé, plus sobre.
GUIDO: C’est ton premier album solo depuis Mud Stories…
An Pierlé: En fait, c’était le moment idéal pour enregistrer un album en solo… Comme ma fille est rentrée à la crèche et que Koen (ndlr: son mari, producteur et membre du White Velvet) bossait sur d’autres projets en tant que producteur, je me suis retrouvée très souvent seule à la maison. J’ai alors commencé à travailler sur quelques chansons que j’avais en stock et qui correspondaient bien à cette approche.
GUIDO: Strange Days fait-il référence à des événements qui t’ont marqués récemment?
An Pierlé: Oui et non… L’album a été enregistré peu avant le 21 décembre 2012. Juste avant la fin du monde. Il y avait et il y a encore pas mal de tensions dans l’air. Je pense aussi que c’est un titre qui évoque assez bien l’ambiance de l’album. Une ambiance un peu mystérieuse, mélancolique.
GUIDO: Il y a une très forte cohérence tout au long de ce disque. C’était une volonté?
An Pierlé: C’est la première fois que je fais un disque aussi cohérent. J’ai mis pas mal de temps à choisir les chansons que je souhaitais garder pour ce projet. Et Koen a fait du super boulot au niveau de la production… On me compare souvent à Tori Amos ou Kate Bush, mais si tu écoutes attentivement leurs albums, tu remarqueras que même si le piano occupe une place centrale dans leurs morceaux, les compositions sont loin d’être mises à nu. L’album Philharmonics d’Agnès Obel est également fort arrangé. Tu peux souvent y entendre une batterie, une basse. Le travail de production de Koen sur Strange Days a été nettement plus ardu qu'on pourrait l'imaginer.
«Such A Shame a marqué mon enfance»
GUIDO: L’une des belles réussites de l’album est sans conteste la reprise du Such A Shame de Talk Talk…
An Pierlé: C’est une chanson qui a marqué mon enfance et m’évoque plein de souvenirs. Cela me rappelle mes premières sorties. Mes vacances dans le Sud de la France. Et Talk Talk est un groupe que j’adore. On connaît tous les tubes tels que Such A Shame ou It’s My Life, mais lorsque tu écoutes les albums du groupe, tu tombes sur des morceaux étonnants, parfois bouleversants.
GUIDO: Les reprises, c’est une spécialité maison!
An Pierlé: C’est vrai que j’adore cet exercice. C’est grâce à une reprise que je me suis fait connaître du grand public (ndlr: Are Friends Electric de Gary Numan) et j’ai pris l’habitude d’interpréter régulièrement des reprises en concert. Il est 5 heures, Paris s'éveille de Dutronc ou C'est comme ça des Rita Mitsouko… Et puis, je sais que le public adore quand je reprends des morceaux.
GUIDO: Strange Days est un album très filmique…
An Pierlé: Je pense aussi qu’il s’agit de mon album le plus filmique, je visualise toutes les chansons… Mon rêve, ce serait collaborer avec Angelo Badalamenti (compositeur de la plupart des films de David Lynch) ou Tim Burton.
An Pierlé: Strange Days (PIAS)