GIRLS IN HAWAII: L’impossible ascension

Après une longue traversée du désert marquée par la disparition brutale de leur batteur il y a trois ans, les Girls sont de retour avec un album lumineux et aérien. Rencontre pleine d’émotion avec Lionel et Antoine, les deux chanteurs du groupe.

Lionel: On a commencé à travailler sur le disque assez tôt après la sortie du précédent. On a pas mal tourné directement après la sortie de Plan Your Escape, avec pour objectif de repartir un studio le plus vite possible. J’étais parti quelques mois sur un fjord en Islande pour composer. C’est peu de temps après mon retour que Denis a eu cet accident… Et tout s’est arrêté brusquement.

Antoine: Après la disparition de Denis, j’ai éprouvé le besoin de m’isoler, de vivre en autarcie. C’est ainsi que je suis parti habiter à la campagne chez des amis artisans luthiers. J’avais besoin de calme, de retrouver la sérénité. De me retrouver seul aussi. Et puis, je voulais voir si l’envie de faire de la musique allait revenir, sentir si je pouvais encore m’y épanouir. Après quelques mois, j’ai commencé à composer quelques titres.

GUIDO: Lionel, tu as continué à jouer avec le reste du groupe pendant qu’Antoine était dans les Ardennes?

Lionel: Oui, j’ai continué à voir Daniel et Brice. Même si le cœur n’y était pas vraiment, nous avons continué à jouer à trois et avons même enregistré quelques titres. De mon côté, j’ai écrit quelques morceaux très pop, le genre de choses que j’écrivais lorsque nous avons créé le groupe tout au début. J’avais besoin, d’une certaine façon, de revenir aux sources, de me rassurer.

Antoine: Nous sommes cependant toujours restés en contact, via Skype. On essayait de se motiver l’un l’autre, même si le groupe n’existait plus vraiment à ce moment-là. C’est ainsi qu’on s’est lancé des petits défis de compos sur des thèmes imposés et que l’on a écrit chacun de notre côté quelques titres. Switzerland, par exemple, est né ainsi. On s’était imposé de tous les deux composer un titre sur un endroit géographique qu'on aime bien et qui évoque Denis. Lio l'a écrite en s’inspirant d’une photo prise sur une aire d'autoroute en Suisse. Après un an, j'avais composé une dizaine de morceaux. Je les ai envoyés à Lionel qui, de son côté, avait aussi pas mal bossé de son côté et ce sont ces maquettes qui ont servi de base à l’album.

Un retour fracassant

GUIDO: Le premier single, Misses, a été très bien reçu par le public…
Lionel: C’est probablement le titre dont nous sommes le plus fiers sur l’album. Il aborde des choses dures avec beaucoup de pudeur et est à la fois moderne et intemporel. Même s’il est mélancolique, ce morceau n’est pas plombé. Il était important pour nous de choisir un premier single

qui puisse bien évoquer l’atmosphère de l’album. Misses était parfait pour cela.

GUIDO: Quelques heures à peine après avoir été annoncé, votre concert au Cirque Royal affichait complet!

Lionel: C’était une énorme surprise pour nous. Après une longue absence, nous ne savions pas si le public allait répondre présent. En fait, notre objectif était de remplir le Cirque Royal sur la longueur et d’ensuite pouvoir éventuellement ajouter une date à l’AB. On ne s’attendait absolument pas à ce que cette date soit immédiatement sold-out. Nous sommes à la fois soulagés, émus… et stressés.

Antoine: On ne savait pas comment le public allait réagir après notre absence. Cinq ans, c’est long. Nous avions peur d’avoir été oubliés.

GUIDO: Pourquoi avoir appelé l’album Everest?

Lionel: Everest, cela renvoie à pas mal d’images et de symboles. La montagne, c’est quelque chose d’immense, mais que l'on peut aussi escalader. Et puis, il y a l’idée du surpassement. L’image des neiges éternelles. Nous avions envie d’enregistrer un album lumineux et plus atmosphérique. Everest correspondait bien à cette image.

Antoine: La montagne revêt aussi un côté tragique, la perte… mais également l’apaisement.

GUIDO: Pour la première fois, vous avez confié les clés du studio à un producteur.

Antoine: Notre choix s’est porté sur Luuk Cox, batteur de Buscemi et leader du groupe Shameboy. Nous avions besoin de quelqu’un pour nous guider, pour faire le tri dans nos idées et nos compositions. Et Luuk a parfaitement rempli ce rôle. C’est un bonhomme bourré d’idées et plein d’humour. Il a tout fait pour nous mettre à l’aise. Le studio, cela nous a également soudés en tant que groupe. On a commencé à entrevoir ce qu'on allait pouvoir faire, ce qu’on allait pouvoir dire.

Nouveau line-up

GUIDO: Le line-up du groupe a évidemment évolué...

Antoine: François Gustin a remplacé Christophe Léonard aux claviers. Il fait partie du groupe depuis maintenant un an. C’est un vieil ami. On le connaît super bien et c’est un choix qui s’est imposé très facilement. Et puis il joue aussi dans un groupe avec Daniel...

Lionel: Remplacer Denis nous semblait impossible. Nous avons fait des sessions sans batteur, mais c’était à pleurer. On a également fait des essais avec Daniel (bassiste du groupe) derrière les fûts et cela ne fonctionnait pas du tout. Cela a été un fameux challenge de trouver quelqu’un pour remplacer Denis. Nous avons enregistré l’album avec Andy Reinard, un chouette gars, mais nous ne nous sommes pas très bien entendus au niveau musical. En fin de compte, c’est Boris Gronemberger qui a rejoint le groupe. Boris, c’est un musicien super occupé, une personne assez centrale à Bruxelles. Cela a été un soulagement pour nous de reformer un clan.

GUIDO: Everest est sans conteste votre album le plus cohérent.

Lionel: Pour le choix final de la playlist de l’album, on a voulu absolument trouver une cohérence. Le choix a été très démocratique. Certains choix sont évidents, d’autres moins. Il y a certainement un côté sombre et triste sur l’album, mais nous voulions absolument que les titres ne soient pas plombés. C’est ce critère qui a servi de ligne rouge au tracklisting de l’album.

Girls in Hawaii: Everest (PIAS)