Préservatifs: mythe et réalité

L'Organisation Mondiale de la Santé a récemment tapé le Vatican sur les doigts après que des cardinaux, des abbés, des prêtres et des nonnes aient envoyé de par le monde des messages annonçant que les préservatifs ne protégeaient pas du SIDA.


Nous avons demandé l'avis éclairé du Dr Jos, qui n'est certainement pas le plus fervent défenseur de l'Eglise. Le préservatif serait-il en train de tomber de son piédestal?

"Je n'applaudis pas des deux mains que le Vatican propage de tels racontars", déclare Dr Jos, "mais, pour une fois, ils n'ont pas totalement tort." C'est comme si le ciel se déchirait en un coup de tonnerre et laissait entrevoir la main de Dieu s'abattant tel un éclair aveuglant devant nos pieds. Dr Jos, le plus grand des mécréants serait-il tout-à-coup devenu catholique?

Dr Jos: Du calme, l'ami. Ce n'est pas demain la veille que tu me verras susurrer des mots doux à un chapelet. Non, c'est juste qu'un point délicat vient d'être soulevé. Il n'est pas vrai que le virus HIV puisse se propager par de petits trous dans le préservatif, comme certains ecclésiastiques le prétendent. C'est n'importe quoi. Mais le contraire, qu'un préservatif offre une protection à 100% contre les maladies sexuellement transmissibles (MST) est encore une plus grosse connerie.

GUIDO: C'est une affirmation hasardeuse, docteur. Pourriez-vous vous expliquer?
Dr Jos: (frappe de sa main une impressionnante pile de papiers) J'ai préparé cet entretien en me plongeant dans la littérature scientifique relative au sujet. Il y a deux mots qui reviennent dans chaque article ou étude sur les préservatifs.

GUIDO: Vaginal et anal?
Dr Jos: Gros dégoûtant! (rires) Non, non: 'correctly' et 'consistently'. On peut dire des choses sensées sur l'emploi des capotes si cet emploi est correct et cohérent. Ce qui veut dire: un préservatif doit être utilisé de la bonne manière et à chaque fois. Ça a l'air simple mais ça ne l'est pas. Une utilisation correcte et cohérente des préservatifs est en pratique quasiment impossible.

GUIDO: (étonné) Docteur! Après des dizaines de campagnes, tout le monde sait quand même comment un préservatif doit être utilisé?
Dr Jos: Ah bon? (brandit une feuille de papier) Voici une étude qui date de 2002, conduite sur des étudiants universitaires américains. Les chiffres sont hallucinants, tiens-toi bien. 60% ne parlent de préservatif qu'une fois au lit. 42% voudraient utiliser un préservatif, mais n'en avaient pas à disposition. 43% mettent le préservatif après avoir commencé. 15% retirent le préservatif avant la fin de la relation sexuelle. 40% ne laissent pas le réservoir du préservatif libre. 30% mettent le préservatif du mauvais côté et 32% des garçons affirment avoir perdu leur érection à cause de tout ce brol. Et voici le plus grave: quand tout avait marché comme il le fallait, un tiers des étudiants avouait que le préservatif était déchiré ou avait glissé. (enlève ses lunettes de lecture et me regarde sévèrement) Voilà. Les étudiants. Et des Américains de surcroît, donc un peu plus stupides que la normale, mais quand même! Même si tu divises les résultats en deux, ça reste inimaginable. Je n'en conclus qu'une seule chose: les préservatifs sont des machins primitifs, peu pratiques et c'est justement ce que l'on n'entend jamais dans les campagnes publicitaires. On y entend souvent des trucs comme 'quel plaisir de baiser avec un préservatif', alors qu'une grande partie des jeunes en ont marre de ces capotes!

GUIDO: Je veux bien le croire, mais ce n'est quand même pas une raison pour le faire sans capote?
Dr Jos: Non, mais c'est une occasion de dire: en effet, mon très cher pape et Sœur Bernadette, vous avez raison. Les préservatifs ne sont pas le meilleur moyen de lutter contre le SIDA, mais bien à cause d'autres raisons que celles que vous avancez.

GUIDO: Quel surprenant raisonnement!
Dr Jos: N'est-ce pas? Tout deviendra plus clair si tu établis un parallèle avec la ceinture de sécurité. Dans les pays où celle-ci est obligatoire, les morts causées par la route n'ont pas ou que très peu baissé. Pourquoi? Parce que la ceinture crée un faux sentiment de sécurité: il y a plus d'accidents, on roule de plus en plus vite, de plus en plus de piétons et de cyclistes sont fauchés sur nos routes… C'est la même chose pour les préservatifs… La vente et l'utilisation de ceux-ci ont spectaculairement grimpé ces dernières années, mais le nombre de MST n'a pas baissé. Au contraire! C'en est donc assez pour t'en ficher un sacré coup? Affirmer que tu peux y aller en toute sécurité avec un préservatif est aussi criminel que d'affirmer que tu peux très bien t'en passer.

GUIDO: (gratte ses cheveux)
Dr Jos: Laisse-moi t'éclaircir la situation avec d'autres chiffres. Provenant de la clinique d'avortement par exemple. Un quart des femmes présentes prétendent être tombées enceintes malgré une utilisation correcte et cohérente des préservatifs. 45% y sont arrivé après une mauvaise utilisation. Encore une autre étude: on y a suivi des couples qui utilisaient le préservatif comme seul moyen de contraception. Après un an, il est apparu que 14% des femmes sont tombées enceinte sans le vouloir. Chez les couples qui affirmaient avoir eu une utilisation correcte et cohérente des préservatifs, le chiffre atteind 3%. Compare cela avec la pilule, qui est plus facile à utiliser correctement et de façon cohérente. Moins de 1%!

GUIDO: En effet, mais ne parlions-nous pas de protection contre les MST?
Dr Jos: Exactement. Tu sais certainement que le HIV est une infection très 'difficile'. Ce qui équivaut à dire que tu dois vraiment avoir la poisse pour contracter le virus après seulement un rapport non protégé. Ainsi, il y a eu des enquêtes auprès d'un certain nombre de couples où seulement un des deux partenaires était contaminé. Cela semble fou, mais 50% de ces couples le faisaient encore sans préservatif! Cela en dit vachement long sur la 'facilité d'utilisation' de ces choses, hein? Enfin, après une année, les utilisateurs corrects et cohérents de préservatifs de ces groupes ne comptabilisent qu'1% de partenaires contaminés. Sans préservatif, cela s'élève à 7%. Ecoute, et c'est ici que se trouve le nœud du problème. Qui va te refiler le SIDA? Un one night stand non protégé? Il y a très peu de chances. Mais, quand, après avoir été depuis longtemps avec un partenaire, tu penses: on peut maintenant se passer de capotes. C'est alors que ça devient dangereux!

GUIDO: Conclusion?
Dr Jos: Une utilisation correcte et cohérente apporte une réduction importante mais pas absolue de se retrouver malencontreusement enceinte ou contaminé par une MST. Malheureusement, cette utilisation correcte et cohérente est difficile à apprendre et à respecter, si bien que cette protection devient encore moindre dans la réalité. Et si les préservatifs entraînent plus de changements de partenaires, le risque peut même grandir. Pour employer une expression à la mode: un grand fossé se creuse entre la perception du risque et le risque réel.

GUIDO: Dr Jos, vous semblez avoir suivi un training média?
Dr Jos: La monogamie ou l'abstinence, Van Caesbroeck, c'est la seule chose qui aide vraiment. Et fous le camp, ça me rend chaud, tout ce blabla sur le sexe. (crie) Femme!!

(RVC)