Une vérité qui dérange Dr Jos: L'impact du réchauffement climatique sur notre santé
Au printemps passé, Dr Jos nous avait promis d'étaler son savoir sur un dossier brûlant, le réchauffement climatique. «Heureusement, nous avons eu un été pourri», nous explique le docteur. «Ainsi, nous avons enfin eu l'occasion de regarder le DVD de Al Gore,
Une Vérité qui Dérange.»
Enferme-toi à clé et tire les rideaux car l'avis du Dr Jos sur le débat climatique du moment risque de faire du bruit.
GUIDO: Ce film vous a plu, docteur?
Dr Jos: (hausse les épaules) Tu appelles ça un film? Ça m'a plutôt fait penser aux sermons du vieux curé de ma paroisse. Pff, si tu as envie d'entendre un tel exposé, mieux vaut encore te rendre à une conférence aux Beaux-Arts. Tant de personnes se sont déplacées au cinéma pour ça? Pour assister au speech d'un tel échalas?
GUIDO: Beaucoup de gens ont été impressionnés par ce 'speech', docteur.
Dr Jos: Ah oui? Il y a certaines choses qui ont heurté mon esprit scientifique. Ce Gore n'est pas avare de trucs démagogiques quand il doute de ses graphiques. Par exemple, il montre un graphique qui démontre que la teneur en CO 2 dans l'air est en augmentation. Correct. C'est ensuite qu'il sort un autre graphique de sa manche, sur lequel on observe une augmentation des températures similaire. Ce graphique, je ne le conteste pas non plus. Mais qui a dit que la corrélation entre les deux pouvait être prouvée? (prend un stylo et dessine une courbe fortement ascendante) Voilà, l'évolution de l'espérance de vie. Précisément la même évolution que celle de la température et du CO 2 . Est-ce que je peux alors conclure que l'un a un quelconque rapport avec l'autre?
GUIDO: Mais docteur, vous ne voulez quand même pas faire partie de ce groupe de scientifiques dissidents qui continuent d'affirmer que le réchauffement climatique n'est qu'un bobard?
Dr Jos: (regard méchant) Ai-je dit une chose pareille? J'affirme seulement que Al Gore utilise des trucs dans son film. C'est tout. Je ne conteste pas le fait que les gaz à effets de serre réchauffent l'atmosphère. Au contraire: alors que personne n'en parlait encore, en 1999, j'ai défendu dans une de mes interviews la position qui établit que les dinosaures ont disparu parce qu'ils lâchaient trop de pets!
GUIDO: (éclate de rire) En effet! Je l'avais complètement oublié!
Dr Jos: (fronce les sourcils) Oui, nous en avons bien ri à l'époque, mais aujourd'hui, cela te semble moins bizarre, hein? Ces grands dinosaures ont lâché des pets du tonnerre pleins de méthane pendant des millions d'années, ce qui est un gaz contribuant à l'effet de serre pire que le CO 2 . En plus, vers la fin, ils étaient trop nombreux et se pétaient les uns sur les autres. Ce qui a amené une augmentation de l'activité volcanique: la terre souffrait donc aussi de flatulences à l'époque. (rires) Le monde s'est réchauffé, leur biotope a subi une évolution et les dinosaures se sont éteints. Eh bien, pour le moment, il semble que la terre se réchauffe aussi. Qui suis-je pour en douter? Je suis médecin, pas climatologue. Je suis donc mieux placé pour parler du côté médical de la chose. Car là est la question cruciale: quel sera l'impact du réchauffement sur notre santé?
GUIDO: (glousse) Je commence de plus en plus à me rappeler de cette interview de 1999, docteur. «Lâcher des pets est bon pour la santé», hahaha!
Dr Jos: (frappe la table du plat de la main) Eh là! Fais un peu attention à ce que je raconte. Les changements climatiques et leur impact sur notre santé, tel est notre propos. Pour commencer, examinons le phénomène le plus frappant: le réchauffement climatique. Imagine qu'on demande à un Esquimau et un Congolais de faire un échange de maisons pendant trois mois. Je suis certain de la chose suivante: alors que l'Africain sera sans aucun doute malade, l'Esquimau passera de super bonnes vacances. Les gens sont mieux armés contre les hautes températures que contre le froid glacial. Quand tu as froid, tes vaisseaux sanguins se contractent et le sang a tendance à se coaguler, ce qui peut causer à terme des attaques cardiaques et des hémorragies cérébrales. Dans quels pays européens penses-tu que l'espérance de vie soit la plus élevée? Dans les pays méditerranéens ou dans le Nord, comme en Ecosse ou en Finlande?
GUIDO: D'accord, mais la canicule a déjà causé pas mal de morts. Je pense ici aux nombreuses morts dans les maisons de repos de Paris pendant l'été 2003.
Dr Jos: (écarte les bras) Qu'est-ce que je peux dire? Airco! Si seulement ces personnes âgées avaient pu vivre bien au frais, il n'y aurait eu aucun problème. C'est pas plus difficile de résoudre le problème. Mais, même sans cela, le résultat des hautes températures est positif sur une année entière. Car ces morts supplémentaires – surtout des personnes très âgées, soyons honnêtes – ne pèsent pas lourd dans la balance face aux effets positifs des hivers plus chauds. Désormais, il n'y aura plus de SDF morts de froid dans les rues de Paris, non? Cela doit aussi être dit.
GUIDO: J'ai lu quelque part que les moustiques porteurs de la malaria allaient venir dans nos régions si il commençait à y faire plus chaud.
Dr Jos: (rire narquois) A voir la manière dont tu exposes le problème, cela prouve que tu n'as aucune vue médico-historique sur le problème. La malaria n'est pas un criminel exotique faisant partie des troupes qui auraient envahi l'Ouest. La malaria a toujours été présente en Europe de l'Ouest et a disparu une fois que nous avons eu les moyens de l'exterminer, il n'y a pas si longtemps de ça. Nous disposons toujours de ces moyens, où est donc le problème? D'ailleurs, ici aussi, il faut regarder l'effet réel. Imagine que des nouvelles infections émergent en été. Elles seront alors compensées par les hivers plus chauds et la diminution de maux d'hiver comme la grippe par exemple. Ce n'est pas un système à sens unique.
GUIDO: L'augmentation prévue des tempêtes, des averses et des tornades… Où en est-on sur ce sujet?
Dr Jos: Est-ce devenu pire qu'avant? Je n'en sais rien. Où se situe la normalité? Je trouve cela un peu limite d'affirmer ce qu'est une quantité de précipitations "normale" ou des températures "normales" sur base de statistiques qui datent de 1860. C'est donc relatif? Peut-être évoluons-nous désormais dans une situation "normale" alors que les 150 ans passés furent anormalement froids? C'est possible, je n'en sais rien. Ce que je sais par contre, c'est que le pire peut arriver et qu'il faut y être préparé. Pourquoi la Nouvelle-Orléans a-t-elle été détruite par l'ouragan Katrina? On savait depuis des années que les digues n'étaient pas de bonne qualité. Pourtant, le gouvernement américain n'a rien fait vu qu'il avait besoin de cet argent pour faire la guerre dans le Moyen-Orient. Eh oui, c'est pour cette raison que l'on se retrouve avec des catastrophes de cette ampleur. Si Katrina avait soufflé sur la Hollande, je peux t'assurer qu'il en aurait été autrement. On peut dire ce qu'on veut des Hollandais, mais ils ont tiré la leçon des inondations de 1953 en investissant énormément dans les digues et autres ouvrages hydrauliques. Tout est une question de préparation. (montre le doigt) Sais-tu ce qui est le plus perfide dans toutes ces discussions sur le réchauffement climatique? Si on suit la logique des prédictions annoncées, il serait en fait souhaitable que les pays en voie de développement continuent à être aussi pauvres qu'à l'heure actuelle. Car si tous les Chinois, Africains et Indiens emmenaient dès demain comme nous leurs enfants à l'école à bord d'un énorme 4x4, on serait face à un grave problème. Enfin, ils auraient un problème, car pour nos contrées, je ne vois que des avantages au réchauffement climatique. Une autre vérité qui dérange, n'est-ce pas?
René Van Caesbroeck
(c) Photo: Diesel
Dr Jos recommande la lecture des ouvrages suivants:
McGeehin e.a., The potential impacts of climate variability and change on temperature-related morbidity and mortality in the United States, Environ-Health-Perspect., mei 2001
Kovats e.a., Global climate change and health: recent findings and future steps, CMAJ., feb. 2005
Butler e.a., Climate change and human health: what can GP's do?, Austral-Fam-Physician., nov. 2006
Staropoli, The public health implications of global warming, JAMA., mei 2002
Sellman e.a., Global climate change and human health, Minn-Med., mrt. 2007
Mackenbach, Global environmental change and human health: a public health research agenda, J-Epidemiol-Community-Health., feb. 2007
Derbyshire, Climate change and health, Lancet., mrt. 2006
McMichael e.a., Climate change and human health: present and future risks, Lancet., jun. 2006
Khasnis e.a., Global warming and infectious disease, Arch-Med-Res., nov-dec. 2005
Simón e.a., Mortality in Spain during the heat waves of summer 2003, Euro-Surveill., jul. 2005
Zell, Global climate change and the emergence/re-emergence of infectious diseases, Int-J-Med-Microbiol., apr. 2004