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06/07/2016

Le réalisateur Ben Wheatley à propos de HIGH-RISE: «Un film qui ne fait pas rire, ça ne m'intéresse pas»

Depuis la parution en 1975 du roman de science-fiction de l'écrivain britannique J.G. Ballard, certains ont essayé d'adapter le livre au cinéma. Il a fallu cependant attendre 2016 pour que cela soit effectivement le cas. Ben Wheatley (Kill List et Sightseers) fait de cette histoire de lutte des classes dans un gratte-ciel un spectacle exubérant rempli de mauvais goût assumé et de satire sexy. High-Rise sortira le 6 juillet dans les salles.


Ben: Enfant, j'avais lu le livre, et récemment je l'ai de nouveau relu. J'ai alors contacté mon agent afin de savoir qui en détenait les droits. Je savais qu'il existait des antécédents de scripts refusés et de tentatives avortées de le filmer. Par hasard, le producteur Jeremy Thomas, qui semblait en détenir les droits, venait de voir mon film Sightseers quelques jours auparavant. Un hasard total, et c'est de cette façon que je suis rentré dans la danse. Amy Jump, qui a écrit le script, voulait recommencer de zéro. Les scripts existants - un sacré nombre - ont été sciemment mis de côté. Elle s'est retournée vers le livre, et elle ne voulait pas être payée pour cela. Il faut dire: elle ne voulait être payée que si nous trouvions le script à notre goût, sinon il serait classé sur la pile de scénarios inutilisés, pas de problème. C'est une façon de faire assez unique.

 

Architecture brutale

 

GUIDO: Situer le film dans les années septante était-il un choix purement esthétique?
Ben: L'histoire ne fonctionnerait pas si elle avait lieu aujourd'hui, à cause des médias sociaux. Dans le livre, le gratte-ciel se trouve loin de la ville et personne ne sait ce qu'il s'y passe. Si on plaçait ce contexte aujourd'hui, tout le monde serait en train de prendre des selfies qui seraient en ligne instantanément, ce qui gâcherait toute l'histoire. Notre vie privée est complètement érodée. Les gens prennent des photos de leur petit-déjeuner et les mettent sur Facebook, imagine donc la vitesse à laquelle les choses extrêmes qui se passent dans la tour se propageraient sur le net. Ça ne fonctionne pas, on aurait été obligé d'enlever au livre toute sa substance. En plus, les seventies partagent un parallèle intéressant avec le présent. À cette époque, il y avait aussi une crise économique, du terrorisme, une urgence environnementale, la progression de la droite, tout ce que nous connaissons actuellement. Cela donne une touche actuelle à cette histoire, mais nous n'aurions pas pu la déplacer en 2016, à cause de la technologie qui se serait mise en travers de notre chemin.

GUIDO: Vous affirmez qu'il a été plus facile de trouver à Belfast des lieux qui ressemblent au Londres des années septante, plutôt qu'à Londres même. Le développement urbain a-t-il là-bas été ralenti par les Troubles en Irlande du Nord?
Ben:
 Non, ce n'est pas la raison. L'architecture la plus brutale du Royaume-Uni a été détruite. Mise en pièces. Quand il en reste quelque chose - comme le Barbican Centre à Londres - c'est alors utilisé. Nous avons cherché un peu partout et on s'est retrouvé à Belfast. On y tourne beaucoup en ce moment grâce à Game of Thrones, et il existe également un fonds de cinéma dans la ville. Finalement, nous avons trouvé à Bangor - une petite ville du littoral non loin de Belfast - un ancien centre sportif vide depuis six ans. C'était exactement ce dont nous avions besoin! En plus, il se trouvait à côté d'un bureau de police, ce qui l'a protégé des vandales. Quand on y est entré, on a eu l'impression de pénétrer dans une machine à remonter le temps. Le bâtiment n'avait jamais été modernisé et semblait tout droit sorti des seventies. À Londres, il existe de tels bâtiments, mais qui ont été depuis longtemps transformés en quelque chose d'autre.

 

Satire

 

GUIDO: Quel est l'avantage du genre de la satire? Vous auriez pu aussi réaliser un film sérieux sur la lutte des classes.
Ben:
 Il suffit de regarder Dr. Strangelove et Fail Safe. Ces deux films datent de 1964 et parlent du même sujet: le danger des armes atomiques. Dr. Strangelove est marrant, Fail Safe non. Eh bien, Dr. Strangelove est devenu entre-temps un classique tandis que personne ne connaît encore Fail Safe. Si tu veux dispenser un message politique dans un film, c'est uniquement possible en y ajoutant une couche de vernis humoristique selon moi. Sans la satire, High-Rise serait devenu un film plutôt indigeste, j'en ai bien peur. L'humour fait partie de la vie, et devrait donc faire partie de n'importe quel film. Un film qui ne fait pas rire, ça ne m'intéresse pas.

 

GUIDO: Cependant, vous privilégiez l'humour noir, qui pourrait se révéler indigeste pour certains spectateurs.
Ben:
 Ah bon? Mais imaginez que je n'y aie pas injecté d'humour noir, le film aurait alors été un véritable supplice? Quel en est le plaisir cinématographique? Où est le divertissement? Quand on va voir un film, on ne veut pas avoir aussi mal que lors d'une visite chez le dentiste? (rires) Je prends pour exemple les films des années quarante. Les films avec Humphrey Bogart contenaient toujours une petite chanson pour réchauffer les esprits. Dingue, non? De la même manière, j'utilise consciemment l'humour, de façon stratégique.

 

Portishead vs ABBA

 

GUIDO: En parlant de chansons: Portishead a enregistré la reprise du SOS d'ABBA pour les besoins du film. Pourquoi cette chanson?
Ben:
 Elle faisait partie du script.

 

GUIDO: Ils n'ont pas dit: ça doit vraiment être une chanson d'ABBA?Ben: Non, ils ont accepté directement. J'ai contacté Geoff Barrow via Twitter, et j'ai été boire un verre avec lui à Bristol. Ça a immédiatement fonctionné entre nous. J'ai demandé: «Tu veux le faire?» Ce à quoi il a répondu: «Yeah!» Et c'était plié. Euh… maintenant que je raconte la chose, je me rends compte que ça peut paraître incroyable, surtout parce que Portishead n'avait plus fait de musique depuis huit ans, mais cela s'est passé comme ça. J'ai encore dû demander l'autorisation à ABBA, qui autorisent rarement des reprises de leurs titres. Eux aussi ont trouvé cela super, parce que Portishead allait le faire. Ce qui ne m'a pas surpris, car ce sont des personnes intelligentes.

 

GUIDO: L'adjectif Ballardian - de l'écrivain J.G. Ballard - figure dans le Collins English Dictionary. Si demain l'adjectif Wheatleyan devait y figurer, quelle en serait la définition?
Ben:
 Aucune idée. Pourquoi voudrait-on faire une chose pareille? (rires) Ce serait très arrogant de ma part d'imaginer une définition pour un tel terme. Je n'ai même pas envie d'y penser.

 


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