Guillaume Grand: «Ras-le-bol de la fadeur!»
Fort de l’immense succès de son premier single, Guillaume Grand fait actuellement l’objet d’un véritable buzz. Mais attention, le gaillard n’a pas attrapé la grosse tête pour autant… Alors que Toi et moi caracole en tête des téléchargements, Guillaume est plus que jamais conscient que sa carrière n’en est qu’à ses balbutiements et que le plus dur reste à faire: s’inscrire dans la durée et se remettre en question…
GUIDO: Comment et pourquoi as-tu commencé la musique?
Guillaume Grand: J’ai commencé la guitare un peu comme tout le monde lorsque j’étais ado, sans véritable but, à part celui de me faire plaisir. Il y a sept ou huit ans, je me suis installé dans les Landes, à Cap Breton, et j’ai commencé à jouer des petits concerts dans les bars. D’abord dans des groupes, ensuite en solo. Mes premières chansons, j’ai commencé à les écrire quand j’avais environ 20 ans.
GUIDO: Et avant la musique, que faisais-tu?
Guillaume Grand: J’habitais en Guadeloupe quand j’étais ado. J’ai toujours fait du surf et je donnais des cours pour gagner ma vie. Cela fait environ 3 ans que j’essaie de faire de la musique mon métier. Maintenant, je vis à Paris, depuis quatre ou cinq ans. C’est nettement plus pratique.
GUIDO: Toi et moi est un énorme tube. Comment vis-tu cette soudaine notoriété?
Guillaume Grand: Pour le moment, j’ai juste une chanson qui marche pas mal, mais c’est très loin d’être un aboutissement, cela ne veut rien dire du tout. Dans 20 ans, si je vis encore de ma musique, je pourrai peut-être me dire que je n’ai pas trop mal travaillé. Mais aujourd’hui, je n’ai pas le droit d’être content. Je n’ai pas le droit d’être bien dans mes baskets. Cela ne change rien dans ma vie. Tant mieux si cela plait aux gens, mais je ne me prends pas la tête.
GUIDO: Ce succès a tout de même des répercussions positives?
Guillaume Grand: Evidemment! C’est vrai que cela induit plein de choses… Bien sûr, je vais pouvoir commencer à vivre de ma passion et pouvoir faire des concerts. Mais c’est loin d’être un aboutissement, c’est juste un tout début de carrière.
L’amour est laid
GUIDO: L’amour est laid est le titre de ton album. C’est un constat un peu triste, non?
Guillaume Grand: Il ne faut pas y voir l’amour dans un couple entre un homme et une femme. En fait, c’est plutôt l’idée que les rapports humains sont complexes. C’est compliqué d’aimer, d’être aimé… Quand je fais un bilan de cet album et en particulier des textes, il me semblait logique de l’appeler L’amour est laid. Pourtant, la vie sans l’amour, ce serait complètement nul, cela n’aurait pas de sens et en même temps, c’est un leurre, un mensonge. Tu ne peux pas être 100% vrai avec quelqu’un… Et pourtant, tu vas quand même le vivre, en sachant que c’est un gros mensonge.
Guido: L’écriture occupe une place importante dans ta vie?
Guillaume Grand: L’écriture, c’est vraiment quand je sens que j’ai quelque chose à dire, quand j’en éprouve le besoin. Je ne me force pas à écrire. Cela vient ou ne vient pas. Il faut que je vive des choses, que je ressente des émotions.
GUIDO: Toi et moi est la toute première chanson que tu as écrite. Première compo et premier tube… Un coup de bol?
Guillaume Grand: Honnêtement, c’est un coup de bol. J’ai fait un compromis, sur une chanson. Enfin, non… Moi, pour dire la vérité, j’aurais enlevé la chanson de l’album. J’ai peur que les gens n’écoutent pas le reste. En Belgique, vous écoutez le reste de l’album, mais en France, c'est une autre histoire. C’est une chanson qui a sans doute ouvert des portes, mais qui en ferme également. J’ai l’impression que c’est mal interprété. Les gens mettent facilement des étiquettes…
GUIDO: Lorsqu’on écoute attentivement les paroles de certaines chansons, telles que Demande au vent, on sent que tu as vécu des choses pas faciles dans ta vie…
Guillaume Grand: Je t’arrête tout de suite… Attention, les chansons ne sont pas nécessairement autobiographiques. C’est ce que je pense, au mot près, mais il n’y a pas de notion de lieu, de temps ou de personne. Il n’y a pas de notion de réel, ou parfois seulement en partie.
Jacques Brel, ce héros
Guido: Quels sont les auteurs de chansons que tu admires, et ceux qui t’ont donné envie de faire de la musique?
Guillaume Grand: J’écoute des tas d’artistes différents: Springsteen, Goldman, … Au niveau des textes, j’admire des gens comme Jacques Brel, Léo Ferré. Dans la nouvelle génération, j’ai un peu du mal… J’aime beaucoup les textes de Bertrand Cantat. Raphaël et Saez écrivent bien, Tété écrit bien aussi. Mais franchement, la majorité des chansons diffusées en radio sont vides. Les textes sont nuls. Aujourd’hui, les gens ont pris l’habitude d’écouter des choses qui sont mal écrites. Moi, cela me fout en l’air, franchement cela m’énerve. S’il n’y a pas de conviction, je ne vois pas l’intérêt de faire ce métier.
GUIDO: On te sent colère…
Guillaume Grand: Oui, franchement! Quoique tu fasses dans ta vie, s’il n’y a pas de conviction, cela ne sert à rien. Il y a un trou de cinquante ans de bonnes paroles… Tu sais, je ne dis pas que j’écris bien, je ne me mets pas sur un piédestal. Mais j’ai le sentiment qu’aujourd’hui, on est gavé de trucs fades, des textes nullissimes. C’est pathétique… J’essaie d’apporter ma petite pierre à l’édifice, comme un honnête artisan.
Guillaume Grand: "L’Amour est laid" (EMI)