FAKE NEWS: Petit guide pratique pour démêler le vrai du faux sur Internet
On en parle tout le temps. On a même l’impression qu’elles sont partout. Certains sites en ont même fait une marque de fabrique. En bref, les fake news sont partout et il serait idiot de croire qu’elles ne sont que le fait des grands de ce monde.
Comment parler de fake news sans évoquer Donald Trump? Son équipe de communication, qui n’a peur de rien, n’hésite jamais à diffuser une fake news, généralement par le biais du compte Twitter du Président. De l’attaque terroriste à la foule présumée lors de sa prestation de serment en passant par le nombre élevé de lois prétendument édictées, le bonhomme n’est pas avare d’une publication. Son but? Détourner l’attention, attiser les craintes, éviter d’être pris en délit de mensonge… un autre mensonge, sans doute plus grave.
Qu’est-ce qu’une fake news?
On leur donne différents noms comme hoax, trolls ou encore rumeurs (certes, un rien plus ancien) mais sous le terme générique fake news, il faut entendre toutes ces informations erronées qui ont pour but de tromper leur destinataire. Lors de différentes élections, aux États-Unis, mais aussi en Europe et même dans notre petite Belgique que l’on croit si paisible, les fake news sont devenues une arme de destruction massive d’électeurs potentiels. Les uns inventent des taxes que les autres instaureraient une fois arrivés au pouvoir alors que les autres accusent les uns de malversations financières de haut vol. Tout cela est publié, partagé et, au final, cru par bien trop de personnes.
Une accélération liée à la technologie
Ne nous y trompons pas: les fake news existent depuis toujours. Au Moyen Âge, les seigneurs envoyaient des troubadours raconter des histoires chez leurs ennemis pour effrayer les populations et faire croire à une puissance qui, au final, était factice. Plus proches de nous, les propagandes de différents états totalitaires ont permis de manipuler des populations entières, de susciter un sentiment de haine, voire même de justifier des guerres. Mais, aujourd’hui, les médias les plus sérieux, mus par une course à l’armement médiatique, n’hésitent pas publier des fake news pour être les premiers à le faire. Si, par la suite, il apparaît que l’information est fausse, ils n’hésiteront pas à diffuser un démenti. Seulement voilà, les démentis ont souvent beaucoup moins d’impact que la fake news qui les sous-tend. Pire, le doute s’est immiscé dans l’esprit du récepteur lambda que nous sommes tous et nous préférons parfois mettre en doute le démenti tant la fake news était plus séduisante.
Pire encore, une fake news est rarement arrêtable. En effet, aujourd’hui, on partage les informations à la vitesse de la lumière. Un titre accrocheur suffit à liker et pour peu que la description de l’article soit séduisante, on partage l’entièreté de l’article, bien évidemment sans l’avoir lu. Paul, étudiant en sciences politiques, avoue avoir déjà été pris à son propre jeu. «Je suis présent sur de nombreux groupes Facebook. Tous liés de près ou de loin à la politique belge. C’est ma passion depuis toujours. Nous partageons les informations que nous recevons via différents canaux afin d’avoir une vue claire du paysage politique de notre pays. Il y a quelques semaines, un de mes contacts, jeune journaliste au sein de la rédaction d’un quotidien, m’a transmis une information sur l’implication possible d’un homme politique dans des soirées que l’on pouvait qualifier de ‘chaudes’ et au sein desquelles la prostitution était monnaie courante. Vous remarquerez, aujourd’hui, je reste discret, mais à ce moment-là, je n’ai pas hésité à publier le nom de cet homme politique. En quelques jours, l’info était passée sur des dizaines de pages Facebook, avait été lue par d’autres étudiants, mais aussi par des journalistes qui, à leur tour, ont répercuté l’information. Bon, je n’étais pas le seul à avoir partagé l’info, mais j’ai ma part de responsabilité. De responsabilité? Deux jours après, mon contact m’a simplement indiqué qu’il avait mal compris l’info qu’on lui avait donnée et que c’était sans doute une fake news. J’ai voulu faire amende honorable, mais qui sera surpris d’apprendre que le post que j’ai alors publié pour démentir mes propos passés a eu beaucoup moins de succès?» se souvient-il.
La base du problème: l’abus de confiance
Non, nous ne parlons pas ici du terme juridique, mais bien de cette mauvaise habitude que nous avons prise de faire confiance à ce que disent nos amis sans jamais vérifier leurs dires. On abuse du capital confiance que l’on peut accorder aux autres. De manière naturelle, on a tendance à croire de facto ce que peut dire un ami… puisque c’est un ami. Quant à savoir d’où il tire son information, plus personne ne s’en préoccupe. Élodie promène souvent son chien au Bois de la Cambre. Elle est membre de différents groupes qui aiment les chiens, les balades et… le Bois de la Cambre. Un jour, une de ses ‘amies’ publie un post indiquant qu’un American Staff avait violemment mordu une joggeuse, que la victime avait dû être hospitalisée et avait de nombreux points de suture sur la jambe. «Je n’ai pas réfléchi. J’ai partagé l’info en indiquant que certaines races devraient être interdites au parc et que les maîtres étaient irresponsables. Comme je fais aussi du jogging, je me sentais concernée. D’ailleurs, mon post a été relayé de nombreuses fois auprès de joggeurs. Sauf que, trois jours plus tard, j’ai appris qu’il n’y avait jamais eu d’agression. J’ai alors demandé à mon amie où elle avait eu l’information. Sa réponse: Facebook. Une rumeur avait donc enflé et j’ai été partie prenante dans sa diffusion. Toujours est-il que le mal est fait. En effet, aujourd’hui encore, j’entends lors de mes promenades dans le parc des gens se plaindre de l’agressivité des chiens.»
Le processus est assez simple: parce que l’info vient d’un(e)ami(e), on la prend pour argent comptant et on évite toute forme de vérification. Sophie l’a appris bien malgré elle. «Je suis plutôt la rigolote de l’auditoire. J’ai une belle bande de copines. Enfin, je devrais dire 'j’avais'. Parce qu’en quelques jours, je suis passée de ce statut à celui de paria. Je n’ai pas tout de suite compris les petites piques lancées par les unes et les autres. On me parlait de rupture de confiance, de trahison. C’est à cette même période que mon petit ami m’a dit qu’il voulait faire ‘une pause’. En clair, je me faisais jeter de tous les côtés. Il m’a fallu plusieurs semaines pour enfin connaître le fin mot de l’histoire. Dans le groupe, Eva a toujours eu le béguin pour mon petit ami. Elle n’a donc rien trouvé de mieux que de distiller des informations sur de prétendues tromperies. Elle m’a donné le coup de grâce lorsqu’elle a réussi à convaincre ma meilleure amie que j’avais couché avec son petit ami. Là, le mec s’est énervé auprès du mien et forts du ‘il n’y a pas de fumée sans feu’, ils ont préféré nous larguer toutes les deux. Une fois la vérité réaffirmée, j’ai cru que les choses allaient rentrer dans l’ordre. Il faudra manifestement du temps. Petite anecdote cocasse? En me donnant cette image de ‘fille facile’, Eva n’imagine pas à quel point les garçons s’intéressent plus à moi. Bon, parfois un peu trop, mais ça, c’est une autre histoire.»
Une fake news est un mensonge, pas l’inverse
Il est important de différencier la fake news du mensonge. Car si la première est forcément le second, l’inverse n’est pas vrai. Le mensonge est beaucoup plus simple. Il est généralement la solution rapide à une situation embarrassante. «J’invente souvent des embouteillages pour justifier mes retards aux travaux pratiques, mais, en réalité, je n’arrive tout simplement pas à me réveiller. Il faut dire aussi qu’un fou a décidé de placer lesdits travaux pratiques à 8h du mat',» nous explique Thomas, étudiant assidu, mais au sommeil plutôt lourd. Le mensonge n’a généralement pas de conséquences à long terme et sera rapidement oublié. Faites toutefois attention au fait que la multiplication de ‘petits’ mensonges fera de vous un menteur compulsif. Vous risquez alors de ne plus jamais être cru, voire d’être traité de mythomane. Mais nous nous écartons du sujet de base. En effet, la fake news nécessite un scénario pour être crédible. Elle est une histoire à elle seule. Plus une fake news sera intelligemment construite et plus elle sera diffusée, répercutée, crue. En outre, elle nécessite aussi des éléments de vérité. C’est le principal jeu des complotistes qui parsèment toujours leurs allégations d’éléments avérés, comme si ceux-ci étaient les garants des énormités qu’ils sont parfois en mesure d’émettre.
On le voit, les fake news ne sont pas forcément le fait des grands de ce monde ou, à tout le moins, de leurs services de communication, de propagande ou de désinformation, appelons-les comme on veut. Raison pour laquelle il est toujours important de mettre les informations que l’on nous transmet en perspective. Cela vous permettra de ne pas être le dindon d’une mauvaise farce.
Pourquoi relaye-t-on une fake news?
Aussi étrange que cela puisse paraître, les fake news possèdent un certain succès parce que nous sommes tous enclins à les relayer. Nous nourririons tous de mauvaises intentions? Pas le moins du monde. Mais voici quelques raisons qui pourraient, un jour, nous faire tomber dans le piège de la fake news.
- Nous sommes humains et l’humain est social. En relayant certaines informations, nous cherchons à appartenir à un groupe. Nous renforçons notre cohésion sociale.
- Nous cherchons à montrer à quel point nous sommes en phase avec les idées dudit groupe auquel nous voulons appartenir. Analyser une information, c’est aussi trouver les failles du groupe.
- Nous avons été embrigadés par le groupe et par ses idées. Lorsqu’une fake news s’en approche, nous n’hésitons pas à la diffuser parce que nous sommes certains que celle-ci est réelle.
- Nous cherchons tous à asseoir nos opinions. Si une information nous permet de confirmer une de nos croyances, nous ne chercherons pas à mettre celle-ci en doute, mais nous en servirons pour appuyer notre idée.
- Nous avons une certaine attirance pour toutes ces informations qui vont à l’encontre de ce que nous pensons être une pensée globale.
- Nous manquons d’esprit d’analyse et avons une grande capacité à nous laisser séduire par les histoires, que celles-ci soient vraies ou non.
5 gestes pour éviter d'être victime d’une fake news
1) Analysez le titre de l’information. Une ponctuation inhabituelle, cherchant à impliquer le lecteur, à le séduire, doit éveiller vos soupçons.
2) Vérifiez l’URL du site sur lequel vous lisez l’information. Il arrive souvent que celle-ci ressemble à un site de confiance, mais soit modifiée en un ou deux points.
3) Assurez-vous que toutes les informations regroupées pour créer la news soient cohérentes, notamment d’un point de vue chronologique.
4) Multipliez les sources d’information afin de vous assurer que ce que vous avez lu ou entendu est corroboré par plusieurs journalistes, auteurs ou spécialistes.
5) Réfléchissez aux intentions de l’auteur. Il est parfois évident que le but est de faire rire. Pensez par exemple à ce premier avril qui met à mal tant de vérités.