MONA: L'application qui sécurise ton retour de guindailles
Actuellement en dernière année d'études en sciences du travail, Mona-Lisa d'Achille (26 ans) a quand même trouvé le temps de développer une application pour aider les autres étudiantes sur le chemin des guindailles (jusqu'à présent uniquement pour Louvain-la-Neuve et Namur). Grâce à MONA, il est désormais possible d'effectuer des retours groupés vers son kot en plein milieu de la nuit et ainsi lutter contre un éventuel sentiment d'insécurité. Elle nous explique en détails le fonctionnement de cette app ingénieuse.
GUIDO: Pourquoi avoir eu envie de développer une application telle que MONA?
Mona-Lisa: Tout est parti d'un constat et d'une envie d'aider. Il y a quatre ans, j'ai créé un groupe Facebook (Louvain-la-Meuf) destiné aux étudiantes de Louvain-la-Neuve. Qui a pris de l'ampleur depuis, nous sommes actuellement 24.000 dessus! L'objectif de ce groupe Facebook était d'avoir un espace de discussion entre filles où l'on pouvait parler de tout, sans tabou, avec respect et bienveillance. Sur ce groupe, on recevait de plus en plus de messages comme «Les filles, on m'a suivie dans cette rue, faites attention à vous» ou «En passant par le lac, j'ai croisé un type louche, ne passez pas par là». Beaucoup de signalements de choses dérangeantes ou d'autres mises en garde. Ou des posts de filles qui arrivaient tard en train et essayaient de savoir si d'autres faisaient le même chemin pour ne pas être seule pour ce trajet. Il y avait clairement une demande.
GUIDO: C'est à ce moment-là que l'idée de l'application a germé dans ton esprit?
Mona-Lisa: En effet. En discutant avec des amis, on s'est dit que ce serait chouette de créer une application pour la sécurité des filles. Dans un premier temps pour Louvain-la-Neuve avant de la développer pour d'autres campus. On s'est donc lancé dans ce projet avec une app recensant deux options distinctes: le signalement des inconvenances ou des dangers et la création de départ groupés. L'application a été créée l'année dernière et on a reçu beaucoup de feedbacks des utilisateurs. Notamment le fait que les signalements étaient hyper anxiogènes pour les filles et accentuaient leur sentiment d'insécurité. On a donc décidé de recentrer la deuxième version de l'application sur les départs groupés. Et c'est ainsi que MONA 2.0 est née!
GUIDO: MONA est réservée uniquement aux filles, comment cela est-il possible concrètement?
Mona-Lisa: La première fois qu'on se connecte sur l'application, il est nécessaire de faire valider son profil. Pour ce faire, il faut prendre un selfie de soi-même et une photo de sa carte d'identité. C'est à nous ensuite de vérifier que le selfie correspond à la photo sur la carte d'identité. C'est très drôle, parce qu'on a déjà reçu la demande d'une quinzaine de garçons! On doit alors gentiment leur expliquer que MONA est réservée aux filles. (sourire)
GUIDO: Vous n'avez jamais pensé ajouter des garçons à l'app, qui joueraient en quelque sorte le rôle d'ange gardien et pourraient eux aussi raccompagner les filles?
Mona-Lisa: On s'est posé la question… Du coup, ils devraient être validés et notés, comme sur BlaBlaCar. C'était plutôt compliqué comme approche. En plus, on a réalisé beaucoup d'enquêtes sur le besoin exact des filles et il en est ressorti qu'elles se sentaient plus en sécurité rien qu'entre filles qu'avec un garçon. Je tiens quand même à préciser que cette application a été développée pour les filles, et pas contre les garçons. On n'est pas en train d'affirmer que tous les garçons sont des violeurs…
MONA, mode d'emploi
Dès que leur profil est validé, les utilisatrices de l'app (gratuite) ont la possibilité de créer un départ groupé. Très facile et intuitive, MONA leur permet d'indiquer l'heure et le lieu du départ ainsi que le quartier vers lequel elles souhaitent se rendre. À partir de là, toutes les autres étudiantes reçoivent une notification, ont accès à ce trajet et peuvent s'y ajouter afin de rentrer de guindaille accompagnées. Une messagerie leur permet également de chatter entre elles.
GUIDO: Entre l'idée originelle et la concrétisation de l'application, un certain laps de temps a forcément dû s'écouler!
Mona-Lisa: On avait beaucoup d'idées et on a beaucoup brainstormé entre nous (ndlr: Mona-Lisa a réuni autour d'elle une équipe composée de Nicolas Sarafidis, François Demoulin, Topaze Adzima et Amélie Givair). Pour la première version de l'application, on a fait appel à un développeur avec qui ça n'a pas matché. On a donc décidé d'arrêter la collaboration et on s'est tourné vers deux autres développeurs dans notre cercle d'amis (François et Topaze). On a aussi pu compter sur l'aide de l'Yncubator de Louvain-la-Neuve qui nous a permis de rencontrer d'autres personnes au parcours similaire ou des experts (juridiques, marketing…).
GUIDO: As-tu réussi à combiner facilement la création de l'application avec tes études?
Mona-Lisa: J'ai toujours combiné le travail et les études. C'est pour cette raison que j'ai fait un Master en horaire décalé, pour pouvoir travailler la journée. En résumé, je travaillais la journée, j'allais en cours le soir et quand je rentrais à la maison, j'étais sur MONA toute la soirée avant d'aller dormir! J'ai réussi à combiner le tout mais disons que ça a pris quand même du temps sur ma vie privée. Vu que c'était un plaisir pour moi de développer cette application, cela ne m'a pas impactée négativement.
GUIDO: Quels sont les principaux retours que vous avez eus de la part des étudiantes?
Mona-Lisa: On a reçu énormément de mails et de messages sur les réseaux. Du genre «C'est vraiment quelque chose qui manquait», «Merci beaucoup, ça nous aide énormément» ou «Je me sens plus rassurée quand je dois rentrer chez moi le soir». Ces messages spontanés nous font vraiment plaisir parce qu'ils nous permettent de constater que MONA aide beaucoup de personnes.
GUIDO: Comment convaincrais-tu les étudiantes de télécharger MONA?
Mona-Lisa: Je pense que je n'ai pas besoin de les convaincre, elles doivent déjà être convaincues elles-mêmes. Parce que ce sentiment d'insécurité est malheureusement omniprésent. Le besoin existe déjà. On a juste créé quelque chose pour répondre à ce besoin. Notre objectif principal, c'est d'aider.
Plus d'infos sur www.mona-belgium.com