Recrutement sur diplôme à l'armée belge
Si tu as eu le temps de détourner les yeux de tes syllabus ce mois-ci, tu n'as certainement pas pu passer à côté de ces affiches: l'armée belge est à la recherche d'universitaires qui veulent devenir militaires. 'Recrutement sur diplôme': il y a plus de quarante postes à pourvoir pour, entre autres, des ingénieurs industriels, des licenciés en informatique, des dentistes, des pharmaciens et des docteurs.
Sur les affiches annonçant la campagne de recrutement de la Défense, on peut voir deux jeunes diplômés sortir gaiement de leur école, un diplôme à la main. Et ce ne sont pas des mannequins engagés pour l'occasion, mais bien des universitaires qui ont été engagés auprès de l'armée. La fille de l'affiche s'appelle Anne Cantineau, et nous sommes partis à sa rencontre au Quartier Reine Elisabeth, un énorme complexe militaire situé à côté des bâtiments de l'OTAN à Evere.
Suivre des formations et grimper les échelons
Anne a étudié l'architecture à Saint-Luc à Bruxelles et s'est ensuite installée en tant qu'architecte indépendante. Trois ans après, elle est tombée sur une offre d'emploi de l'armée. "J'ai tout simplement considéré cette offre comme une autre," nous raconte Anne. "Que ce soit à l'armée ne m'a pas dérangé outre mesure. Le contenu du job me plaisait, ainsi que les conditions de travail. J'ai ici beaucoup de possibilités de suivre des formations, d'aller à des congrès d'architecture, de grimper les échelons… Je trouve que le salaire et le règlement des vacances sont ici très favorables, et nous avons également une excellente infrastructure sportive à disposition. Et si plus tard viennent les enfants, ils ont aussi prévu les règlements et les possibilités de garde nécessaires."
Que le 'vrai' militaire se lève!
Un universitaire recruté sur diplôme par la Défense devient officier de fonction et reçoit à partir de son premier jour le salaire d'un sous-lieutenant, ce qui correspond à ce que quelqu'un du même niveau gagnerait dans la fonction publique. Après un cours accéléré sur les habitudes militaires, le nouveau militaire se met au boulot. Quelle différence y a-t-il alors entre un diplômé de l'Ecole Royale Militaire et quelqu'un qui est directement bombardé officier de fonction? Anne: "En théorie, il n'y a aucune différence, mais on sent bien qu'il y a ici trois sortes d'employés différents. En premier lieu, nous avons les 'vrais' militaires qui ont suivi dès le début une formation militaire. Deuxièmement, les personnes comme moi, qui sont aussi officiers, mais qui ont été recrutées après leurs études dans l'enseignement supérieur normal. Je ne suis pas en train de dire que les 'vrais' militaires nous regardent de haut, mais parfois l'un d'entre eux nous considère comme des poules mouillées parce que nous n'avons suivi que trois mois de formation militaires. ( rires) Je ne me soucie pas de telles remarques. Ces trois mois furent assez longs, il n'était pas question de devenir tireur d'élite ou une autre fonction du genre! En plus, il n'est pas possible d'étudier l'architecture à l'Ecole Royale Militaire, il est donc logique que l'armée doive alors recruter ailleurs. Enfin, il y a une troisième catégorie, et ce sont les citoyens qui travaillent ici."
Première Compagnie
Pour nous, pauvres citoyens, beaucoup de clichés nous viennent à l'esprit lorsque l'on pense aux militaires. On pense alors à la discipline de Première Compagnie ou encore à une machine bureaucratique dans laquelle les militaires ne sont que d'infimes rouages. Anne a-t-elle remarqué un tel fonctionnement quand elle a fait connaissance avec la manière militaire de travailler? "Comme dans toutes les grandes organisations, il y a dans l'armée des employés qui comptent leurs heures chaque jour, même chez les jeunes," nous avoue-t-elle. "Je ne comprends pas très bien ce genre de comportement, c'est sûrement parce que je suis restée indépendante pendant trois ans, ce qui m'obligeait à avoir de longues journées. Ce qui me frappe aussi, c'est que les collègues qui ont étudié à l'école militaire sont très concentrés sur leur carrière et veulent tous grimper dans la hiérarchie de l'armée. Les recrutés sur base du diplôme ont également la possibilité de devenir colonel ou major, mais ce n'est pas ce qui m'intéresse en premier lieu. Pour moi, c'est le contenu du job qui prime. Je veux dessiner, concevoir des bâtiments, assister à des réunions de chantier, c'est ce qui m'a passionné depuis le début de mes études."
Les femmes dans l'armée
Les femmes dans l'armée ne sont plus aussi rares que dans le passé. 8% des militaires belges sont des femmes, et ce pourcentage augmente au fur et à mesure que l'on grimpe dans la hiérarchie. Le service de recrutement ressent cela surtout lors ce genre de campagne de recrutement: 23% des postulants possédant un haut diplôme sont des femmes. Les salaires à la Défense sont aussi identiques pour les hommes et les femmes, ce qui ne semble toujours pas être le cas dans le secteur privé. Tout cela est très joli, mais l'armée n'est-elle cependant pas encore et toujours dominée par les hommes? Un léger sourire transparaît sur le visage de Anne à l'annonce de cette question. "Mouais, encore un peu. Lors des réunions, je me sens encore parfois comme une 'petite fille' et j'ai l'impression que les avis des officiers masculins plus âgés sont plus pris en compte que les miens. Et naturellement, de temps à autre, une blague fuse, c'est inévitable. Surtout si tu ne te laisses pas faire par les hommes." ( rires)
Se construire une carrière
Après trois ans à la Défense, Anne sait maintenant très bien à quoi ressemble une carrière militaire. Se voit-elle passer le reste de sa carrière à l'armée? "J'ai été nommée," nous confie-t-elle, "je peux donc travailler ici jusqu'à ma pension si j'en ai envie. Ce sera peut-être le cas, je ne le sais pas encore. Il y a de toute façon assez de variété. Si je regarde en arrière, je suis très fière de toutes les choses que j'ai pu concrétiser, comme la construction et le réaménagement du Bloc 13, ici dans le Quartier. Cependant, suite à des économies budgétaires, il y a aussi un certain nombre de projets auxquels j'ai collaboré qui sont tombés à l'eau, et cela est évidemment frustrant. Un architecte travaille en premier lieu pour voir ses idées concrétisées. Si ceci est possible dans le futur, je me vois alors construire une belle carrière à l'armée."
(HDP)
Plus d'infos: www.mil.be/jobs ou 0800/14936 (avant le 27 juin!)
Les étudiants en dernière année qui ont une seconde session peuvent également se proposer